CAUCHEMAR AMÉRICAIN

Le rêve américain qui se transforme en cauchemar suite à une mise à mort qui ne peut même pas s’apparenter à une bavure policière à l’encontre d’un jeune Africain. Un texte puissant de Hakim Bah scandé comme un rap que rehausse poétiquement un numéro de roue Cyr époustoufflant. Un grand moment de théâtre et de cirque à la fois.
Pour avoir trop rapidement sorti sa carte d’identité lors d’un contrôle de routine, un jeune Guinéen installé à New-York depuis trois ans, est abattu par les forces de police de plus de 40 balles. S’emparant de ce fait divers, Hakim Bah en tisse une tragédie humaine sans concession. Les mots claquent, se répètent beaucoup comme pour mieux les faire entendre et assimiler. C’est un cri, un hurlement face à l’injustice, la condition des Africains dans la plus grande démocratie du monde, la déshumanisation d’un monde en perdition. La poésie n’a pas sa place dans un tel dispositif narratif : il faut que passe le message fort et clair, comme une réponse à l’identique aux dizaines de coups de feu qui ont traversé le corps du supplicié.
UN CONTREPOINT POÉTIQUE DE TOUTE BEAUTÉ

C’est un virtuose de la roue Cyr (voir photos), Juan Ignacio Tula, qui va assurer le contrepoint poétique de ce spectacle engagé. Et enragé, notamment vers la fin avec un message éminemment politique. Avec son instrument issu du cirque, il paraphe de ces acrobaties l’espace scénique avec une aisance confondante. En mouvement quasi permanent comme pour métaphoriser la ville qui ne dort jamais, il traduit également un monde qui ne tourne pas rond, un monde où tombent des corps innocents. Son numéro s’intègre parfaitement aux mots de Hakim Bah qui les scande comme un rap. Tout deux ont assuré un spectacle fort et fort apprécié par les spectateurs de l’Institut français, malgré l’absence des musiciens qui d’ordinaire les accompagnent.
Franck BORTELLE
Texte : Hakim Bah
Avec Hakim Bah, Arthur B. Gillette, Juan Ignacio Tula à la roue Cyr.

