AVEC LOGIQUE…

La détentrice de tous les records de vente, aussi bien de disques que de billets de concert, réalisera une prestation lors de la cérémonie d’ouverture du prochain Festival de Cannes. L’occasion de revenir sur le parcours jalonné, et forcément jalousé, de cinéma de la chanteuse.

Les rageux se sont lâchés sur les réseaux sociaux dès qu’a été annoncée la participation de celle que tous les fans n’appellent plus que par son prénom à la cérémonie d’ouverture du prochain Festival de Cannes. Ces mêmes empêcheurs de tourner en rond, qui eux préfèreraient la siffler que la nommer, auraient pourtant tout intérêt à aller vérifier la totale légitimité de cette présence à un tel évènement. En effet, la chanteuse qui domine la variété française depuis maintenant 40 ans, n’a cessé depuis ses débuts, de convoquer le 7ème art dans son travail…

Commençons par le début : le patronyme. « Farmer » a été choisi par l’artiste en hommage direct à la comédienne de cinéma Frances Farmer, dont la vie fut une succession de souffrance et d’internements. La chanson « Maman a tort » fait d’ailleurs explicitement référence au film « Frances » (1982) qui relatait la vie de la comédienne. N’oublions pas non plus que le titre de cette chanson sera aussi quelques années plus tard (en 2016, réalisé par Marc Fitoussi) celui d’un film : hasard ou coïncidence ?

DES CLIPS COMME DE VRAIS FILMS

On peut ne voir aucune référence cinématographique dans la chanson « Tristana », même si un film éponyme existe et signé de l’immense Luis Bunuel avec Catherine Deneuve dans le rôle d’une jeune femme handicapée, mais il n’échappera à personne en revanche que les images du somptueux clip de Laurent Boutonat renvoient à Blanche-Neige et consacre la chanteuse comme une excellente comédienne (les grincheux savent-ils seulement qu’elle a de surcroit fait le Cours Florent ?).

Les clips, parlons-en ! Bourrés de référence (« Barry Lyndon » de Kubrick pour « Pourvu qu’elles soient douces »), ces véritables mini-films aux budgets souvent colossaux ont assis la carrière de la chanteuse-comédienne dans la catégorie « hors normes » dont elle est encore aujourd’hui la principale (pour ne pas dire l’unique) représentante à travers ses records, le gigantisme des prestations scéniques mais aussi la discrétion qu’elle entretient sans jamais se faire oublier. N’omettons pas non plus les noms des cinéastes qui jalonnent la carrière de Mylène Farmer : Abel Ferrara (le clip de « California »), Luc Besson (qui réalise « Que mon coeur lâche ») sans oublier François Hanss qui réalise plusieurs clips (dont le magnifique et sulfureux « Je te rends ton amour ») et toutes les captations de concerts depuis le début.

COMENCINI, GUITRY, KASSOVITZ, LEAN... ET FREARS !

« L’incompris » de Luigi Comencini, « La fille de Ryan » de David Lean (son film fétiche) sont clairement cités (« Elle a dit » sur l’album « Monkey me » et en ouverture de l’album « Innamoramento » sur le titre « l’amour naissant ») lorsque Sacha Guitry et son « Si Versailles m’était conté » servent d’appui au titre « Si vieillir m’était conté ». Bien sûr, difficile de ne pas voir dans l’entêtant « M’effondre », un gros clin d’oeil à « La Haine » de Mathieu Kassovitz avec le martèlement de la phrase désormais culte « Jusque là tout va bien ». Mais si on ne devait retenir qu’une seule chanson qui est née grâce à la cinéphilie de la chanteuse, ce serait sans coup férir l’envoutante litanie d’amour et de mort qu’est « Beyond my control », titre directement capturé du film « Les liaisons dangereuses » de Stephen Frears. La parolière qu’est Mylène Farmer ira jusqu’à utiliser la voix de John Malkovich (qui joue Valmont cette adaptation du roman de Laclos) scandant ces trois mots dans le film.

Le cinéma a régulièrement fait appel à Mylène Farmer également en tant qu’actrice. « Giorgino » de son alter ego musical et réalisateur des premiers clips Laurent Boutonnat sera le premier long-métrage où apparaîtra la chanteuse. S’ensuivront quelques opus supplémentaires dont « Ghostland » de Pascal Laugier qui quelques années plus tôt réalisait le clip de la chanson « City of love » (album « Interstellaires ») très inspiré de « Psychose » d’Hitchcock et de l’univers de Tim Burton. Souvenons-nous également du film « Presque rien » de Sébastien Lifschitz dans lequel un des personnages parodiait la chanson « Libertine ».

DEUX CHANSONS DE FILMS

A deux reprises, la chanteuse prêtera sa voix pour des génériques de films. Pour le dessin animé « Les Razmokets à Paris » (2000), elle écrit et interprète le très ambivalant « L’histoire d’une fée, c’est » et bien sûr, c’est sa voix envoutante qui saisit le spectateur à la fin de « Jacquou le Croquant » (2007) de Laurent Boutonnat avec le magnifique « Devant soi ».

Si l’on ajoute à cela la coécriture de quelques scénarios de ses clips (« l’Ame Stram Gram », « Tristana »), force est de reconnaître que la légitimité de la chanteuse au Festival de Cannes (où elle fut d’ailleurs jurée en 2021 avec Spike Lee comme président) n’est plus à prouver. N’en déplaise à ceux qui confirment que « pour plaire aux jaloux, il faut être ignoré ».

Franck BORTELLE

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