
TOUT EST SPECTACLE, TOUT EST SCÈNE, TOUT EST DANSE…
C’est à un très beau moment de danse que nous ont conviés les 16 artistes africains sous la férule du chorégraphe Jorge Puerta Armenta dans ce lieu atypique dont ils ont su faire vivre et investir chaque mètre carré… La synergie était totale pour ce spectacle osé qui renvoie à la source de la création avec toutes les vicissitudes que cela peut supposer. Une très belle réussite…

« L’art naît de contraintes, vit de luttes et meurt de liberté » disait André Gide. Cette phrase du célèbre penseur et romancier français pourrait résumer toute la genèse de ce généreux moment de danse qu’ont présenté seize artistes africains dirigés par le célèbre chorégraphe d’origine colombienne Jorge Puerta Armenta. A partir de pas grand-chose (contraintes budgétaires…), il a proposé de montrer que le spectacle n’est pas toujours là où on veut le cantonner et qu’il ne se fait pas en un claquement de doigts… Il se prépare dans l’abnégation (et la lutte…) et trouve sa liberté ailleurs que dans celle que lui accorde l’opulence… Le pari était osé, il est remporté haut la main…

UN WORK IN PROGRESS
Les habitués du spectacle vivant, confortablement installés dans des fauteuils moelleux dans les grands théâtres et attendant la perfection qui rentabilisera leurs investissement et déplacement, auraient tout intérêt à venir voir ce genre de représentation. Car non, un spectacle n’est pas cet objet toujours calibré, carré, formaté. Le chemin qu’il suit pour arriver devant un public parfois très exigeant n’est-il pas une succession de spectacles à part entière ? C’est ce que nous montre le chorégraphe en réunissant ces artistes africains qu’il a fait travailler quelques jours seulement pour les livrer ensuite au public qui plonge malgré lui dans les arcanes de la création. Les approximations, les consignes du patron et même les accessoires faits de bric et de broc vont bien sûr accentuer ce processus.

DU SOL AU TOIT EN PASSANT PAR LES FENÊTRES…
Mais ça ne s’arrêtera pas là. La scène du centre culturel « Brin de chocolat » restera quasiment dans le noir et sera le seul endroit déserté et zappé. A quoi bon une scène pour faire de la scène ? Idée bien incongrue mais très saine lorsqu’on voit ce qu’a proposé cette bande de joyeux drilles qui ont investi le bâtiment du lieu pour se l’approprier. Le bâtiment et le reste car l’arbre bien planté au beau milieu de la cour aura les honneurs des athlètes autant que le portail d’entrée ou la jauge où le public aura pris place et sera d’ailleurs convié à participer. Toit, sol, barreaux de fenêtres, trottoir : chaque mètre carré est exploité.
TOUT FAIT SENS ?
Vouloir trouver du sens à chaque saynètes n’est pas forcément la meilleure manière d’aborder ce spectacle qui se veut avant tout, ainsi que l’ont confié les intervenants, un moment de partage et de joie. Mais tout de même, les esprits un peu analytiques pourront toujours percevoir dans certains détails de quoi alimenter leur sens de l’exégèse. Car après tout, le poids des fardeaux, la symbolique des barreaux, les luxes des lumières crachés en pleine figure ont aussi leur charge de sens…

« Tout est danse » a astucieusement souligné la chorégraphe Nadège Ametogbe au moment du débat avec le public. Chaque mouvement du corps est une chorégraphie. Certains en font leur métier, d’autres restent des sacs de noix dès qu’ils gigotent aux premières notes d’une musique entrainante mais tout est danse. De la même manière que tout est spectacle, tout est scène…
Franck BORTELLE
Projet ICC le 25 avril 2025 au Centre culturel Brin de chocolat.
Formateur : Jorge Puerta Armenta.









