TROP LONG, TROP LOURD, TROP BAVARD

Sur une idée de départ prometteuse et diablement originale puisque partant du sacrosaint postulat qu’on peut rire de tout, l’équipe de mise en scène se prend les pieds dans les planches avec un spectacle foutraque et déséquilibré que rehausse très péniblement une interprétation de qualité. Dommage…

Apanage de la culture française apparu au XIXè siècle à Paris, le cabaret s’inscrit dans la plus pure tradition populaire du spectacle au point que même le cinéma US s’en est emparé (le célèbre « Cabaret » de Bob Fosse). C’est d’abord un lieu où l’on boit à volonté tout en suivant un show, qu’il soit chanté, dansé, mimé ou persillé d’acrobaties. Devenu un genre théâtral à part entière, il est toutefois, à l’exception de salles qui lui sont entièrement dédiées, assez peu proposé en contrepoint au théâtre dit «classique ». Peut-être parce qu’en matière de mise en scène, il n’est pas donné à tout le monde de réussir à imposer une rigueur dans un genre qui par définition est assez foutraque.

Une très bonne idée de départ

L’idée d’utiliser ce mode d’expression pour parler d’un sujet éminemment grave, l’esclavage en l’occurrence, était excellente. Le retour des Amériques en terre natale, le Dahomey, va donc être le point de départ. Vont se greffer maintes péripéties à commencer par celle de la langue. Le revenant est lusophone… S’ensuit une avalanche d’aventures entrecoupées de chants et de danse, l’action se déroulant précisément dans un cabaret.

Un spectacle de cabaret est un tourbillon de folie, pas un pensum où le dialogue prime, phagocytant toute cette exubérance inhérente au genre. C’est là que le bats blesse sur cette représentation. Malgré quelques éclats de rire qui vont se faire entendre çà et là, le dialogue logorrhéique, majoritairement en dialectes africains, va rapidement lasser créant ainsi, faute de rythme, d’innombrables longueurs.

Des comédiens investis

Tout cela est d’autant plus dommage que visuellement l’ensemble est réussi avec une folie assumée dans les costumes, les accessoires, les maquillages et que le décor du Magic Mirror de l’IFT se prête par ailleurs parfaitement au genre. Les comédiens, quant à eux, affichent une indéniable qualité de jeu, une présence scénique parfois bluffante et un appétit de divertir qui ne peut mentir. Cela ne suffira pas pour hisser ce spectacle vers des sommets pas plus que le bord de scène qui suivra (avec notamment l’intervention très drôle de l’auteur du roman). Des coupes seraient les bienvenues afin de remettre au cœur du dispositif ce qui constitue l’essence du genre : la danse, le chant et la musique.

Pour l’heure, c’est plutôt le spectateur qui déchante…

Franck BORTELLE

Ecriture : Kangni Alem

Mise en scène : Gaëtan Noussouglo et Marcel Djondo

Vidéo : Arthur Poutignat

Avec Florisse Adjanohoun, Sophie Métinhoué, Félicité Notson Kodjo-Atsou, Agbléta Kokou dit Gbadamassi, Eustache Bowokabati Kamouna, Mawufemo Passa dit Manou le prophète, Roger Atikpo.

Prochaines représentations : Tsévié, Université de Lomé et Palais de Lomé.

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