MÉTISSAGE ET PLURIDISCIPLINARITÉ
Une sortie de résidence qui s’est terminée comme une immense fête. Un bel événement dans le cadre du programme Togo Créatif où se mêlaient danse, récit, chant et musique. Si la forme est indéniablement belle, le fond demeure sujet à quelques réserves.
La pluridisciplinarité, c’est comme le métissage : ça peut être très bon ou réserver de bien désagréables surprises.
En quelques semaines, ce sont des danseurs, des chanteuses, des percussionnistes et autres musiciens qui ont travaillé d’arrache-pied pour faire jaillir un spectacle haut en couleur (un grand bravo au costumier) extrêmement généreux. La somme colossale de travail se faisait oublier pour laisser la place au spectacle.
Le métissage au coeur du dispositif
Franco-togolaise, Laura Prince a vécu ce que cet état de métisse peut engendrer de douleurs autant que de bonheurs. Elle revient donc sur son parcours pour rappeler, si besoin était, que vivre en harmonie avec l’Autre n’est pas chose simple lorsque ce dernier vous rejette ou fera tout pour détecter la faille en vous. Nous ne sommes finalement pas loin de la bêtise qu’incarnent les fameux « Imbéciles heureux qui sont nés quelque part » chers à Brassens et qui vous ostaraciseront parce que vous n’avez pas été baptisé à l’église de leur village…

Un spectacle de haute tenue donc, sans le moindre misérabilisme, ponctué de chansons hélas un peu trop anglophones mais qui conféraient à l’ensemble une ambiance entre jazz et traditions africaines, le tout rehaussé par la belle performance de deux danseurs magnifiques et d’un ensemble de percussionnistes pour le moins… percutants !
Si la forme est effectivement belle, le fond laisse toutefois à désirer. Nous ne ressentons en effet jamais vraiment la douleur subie par la narratrice de cet état de métisse et de facto, l’émotion a déserté la scène. Le métissage semble servir de faire-valoir au lieu d’être exploré en profondeur. Et l’on n’est guère surpris de ce fait d’entendre lors du débat qui suivit une spectatrice parler de « faux problème » s’agissant du métissage. Un faux problème, non, bien sûr mais le métissage est ici traité comme tel. C’est un peu dommage.
Franck BORTELLE
Ce spectacle s’est joué à l’Institut français du Togo le 28 octobre 2023


