TROIS JAMBES POUR DEUX

Un précipité d’existence mené à une allure folle et où se mêlent danse, cirque, acrobaties. Sans jamais sombrer dans le pathos, le duo gagnant qui a inauguré l’année 2024 à l’IFT a proposé un spectacle d’une rare intelligence où s’invitent émotion et drôlerie. Sans oublier cette profonde légèreté qui a séduit un public venu nombreux et qui a manifesté un enthousiasme totalement justifié.

Ils sont deux. Mathurin et Hèdi. Deux amis. Cela se lit sur leur visage mais plus encore dans la délicatesse de leurs mouvements où prévenance et bienveillance se taillent la part belle. Ils n’ont que trois jambes à deux. Lequel des deux est amputé ? On ne se posera même pas la question puisque tous deux ont chacun deux béquilles comme pour signifier qu’ils sont pareils. Et chacun est de toute manière la béquille de l’autre. Comme deux jumeaux. Or, les jumeaux, c’est bien connu, ça partage tout. Et ça se chamaille aussi parfois. Ça peut même se transformer en bagarre. Pour un oui, pour un non. Mais, comme le chantait Brassens dans « Les Copains d’abord » : c’est l’amitié qui prenait l’quart….

Beaucoup d’intelligence

Dans un précipité d’existence et des choses de la vie, les deux artistes livrent dans un format (trop ?) court une démonstration de force et d’opiniâtreté. Leur spectacle, déjà joué plus de trois cents fois dans le monde entier, regorge d’idées et d’intelligence. C’est subtil, poétique, parfois drôle et sans le moindre pathos qui eut alourdi bien inutilement le propos. Jouant de leur paire de béquilles comme d’autres d’échasses ou de patins à roulettes, les exploitant sous toutes les formes possibles, ils proposent des figures étonnantes où le handicap se fait totalement oublier, où le partage (au sens très fort) règne en maître absolu. C’est une très belle leçon de courage et d’espoir qui se lit dans ces sauts périlleux et ces chorégraphies. Le tout doublé d’un puissant message d’humanité. Un résultat bluffant.

Franck BORTELLE

« Ali » de et avec Mathurin Bolze et Hèdi Thabet.

Le 13 février à l’Institut français.

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